Catégorie : Un bon film, un!

Les Poupées russes

Le 2e volet de la joyeuse saga amorcée avec l’Auberge Espagnole. Où l’on retrouve la plupart des personnages, quelques années -et moultes aventures- plus tard.
Le point central est bien sûr Xavier (Romain Duris), qui connait plusieurs déboires amoureux et professionnels, comme écrivain et amoureux. Autour de lui, on retrouve la belle Martine (Audrey Tautou), devenu activiste, maman et son ex/amie. On assiste aussi à ses retrouvailles, non sans remous, avec la jolie rousse Wendy (Kelly Reilly). C’est aussi quelques belles histoires d’amour, non pas simples mais à tout le moins intenses et qui valent apparemment la peine d’être vécues.
À nouveau, c’est un beau film assez rigolo, parfois léger, parfois plus complexe et complètement sympathique.
Un film sur l’engagement, la peur de celui-ci, la difficulté de marier les rêves et les attentes avec la réalité. Sur le respect et l’estime, de soi et des autres. Et la déception, parfois, celle que l’on subit ou que l’on cause. En résumé, un film qui parle du cours normal de la vie… soit le fait de vieillir -lentement mais sûrement!- et de s’assumer, ainsi que ses gestes… ou non!?!
La caméra est toujours rafraîchissante et en mouvement. Incluant des changements de plans vivants, intéressants et parfois même inventifs.
Tous les comédiens sont franchement à l’aise. Romain fait preuve d’une grande humilité et, du coup, d’une belle crédibilité. Idem pour William (Kevin Bishop), le frère de Wendy, qui vit de bien grands moments.
Si je faisais ma cinéphile un peu trop exigente et quelque peu blasée, je dirais que le film est vraiment bien mais n’a pas la fraîcheur, la nouveauté et le rythme effréné qui faisaient en grande partie le charme du premier.
Je viens donc de le faire, je crois. En ajoutant qu’il s’agit également d’un bien agréable moment de cinéma. C’est tout bon, quoi (faute d’être également original, disons, cette fois).
Réal.: Cédric Klapisch, France/Grande-Bretagne, 2005.

L’Audition

Un film à l’image de son réalisateur, rempli d’émotion et d’intensité, du début à la fin. Mais de l’émotion sincère.
Un scénario plutôt original, qui fait du bien à voir et entendre. Qui parle principalement d’amour, avec, comme trame de fond, celui d’un père pour son fils, qui rejoint aussi celui d’un couple, l’un pour l’autre, puis l’amour d’autrui et de soi.
Un film tout simple, tellement humain, qui vient vraiment nous chercher. Je n’avais pas trop lu sur le sujet, ne voulant rien enlever à l’intérêt de celui-ci. Je l’ai donc vécu de la meilleure façon possible, en le découvrant, intensément. Je ne vous en dirai pas plus sur l’histoire non plus, préférant vous laisser la découverte à votre tour, s’il y a lieu. Mais en gros, ce sont les histoires parallèles et conjointes de Louis, un homme qui fait payer (physiquement) les gens qui n’honorent pas leurs dettes, qui en a marre de cette vie et rêve de toute autre chose, ainsi que celle de Suzie, sa blonde, qui vit des choses très dramatiques et remet en question son mode de vie. Et qui s’aiment. Beaucoup.
Le propos -comme les dialogues- est tour à tour drôle, sérieux, tragique, émouvant et toujours, je l’ai dit, toujours très humain et intense. Tiens, je viens donc de le répéter! Mais je pense que ça rend justice à l’œuvre. De façon surprenante, les quelques scènes de violence (nécessaires, vu le propos) sont elles aussi remplies d’émotion et d’humanité. Les petites scènes de discussion entre Louis et Marco (Alexis Martin) sont délicieuses. Une mention spéciale pour le très rigolo caméo de Robert Lepage… dans ce que l’on imagine, assurément, un rôle de très grande composition!
La caméra est belle. On y voit de très jolies images de Montréal, dans des angles un peu méconnus. J’ai beaucoup aimé le parallèle entre le survol physique de la ville et des différents lieux, latéralement (les plans vus de haut) et celui des propos, passant tour à tour d’une certaine proximité à une certaine distance, telle une grande confidence puis un lourd secret. Peut-être ne s’agit-il que de ma propre interprétation!?!
Avec de formidables comédiens, dont Suzanne Clément, Alexis Martin et Denis Bernard pour ne nommer que ceux-ci, les principaux. La musique est vraiment très belle, émouvante et enlevante, comme le propos. Signée Daniel Bélanger. Un excellent choix, un très bon complément au film.
Je connaissais Luc Picard, le très talentueux comédien. Je viens de faire la connaissance de Luc Picard, l’habile et très humain réalisateur. Un artiste qui sait apparemment très bien raconter les histoires, derrière comme devant la caméra. Je lui souhaite de continuer ses belles carrières… pour notre plus grand plaisir.
Réal.: Luc Picard, Québec, 2005.

Familia

Ayant vu les bandes annonces depuis un bon moment déjà, j’avais hâte de voir ce film. Pour le sujet, qui m’apparaissait à tout le moins prometteur, ainsi que pour les formidables comédiennes et comédiens.
C’est, en très résumé, l’histoire de deux femmes et mères, des drames -très différents- qu’elles vivent chacune de leur côté, ainsi que de la relation qu’elles ont avec leurs filles mais aussi avec leurs propres mères. Lesquelles relations sont très représentatives de la nature même des personnes qui les vivent. Il y en a pour tous les goûts – et toutes les réalités (faut voir le film, quoi!). Les deux femmes se retrouvent tout à coup à partager leur quotidien à des moments charnières de leurs vies respectives. C’est tout sauf simple, c’est chargé de tension et de potentiel de problème.
Chose certaine, ce n’est pas une comédie. Un film sur le malaise, le vrai, celui qui se fout complètement des autres et de ce qu’ils vont penser. Un drame familial, je pense que c’est la meilleure façon de résumer la chose. On devine, petit à petit, les événements et la tournure qu’ils vont prendre. Mais en y réfléchissant, ça n’est pas grave car là n’est pas l’intérêt premier du film, à mon avis. Il est plutôt dans les réactions des personnages, dans leur façon d’agir, dans l’atmosphère créée par eux. C’est dérangeant, c’est très crédible et ça nous fait réfléchir sur la différence, le respect, l’intégrité et les choix. Ceux que l’on fait et ceux que l’on impose. Le tout, sans en rajouter ni en faire trop. Un très bon point, dans les circonstances.
Sylvie Moreau et Macha Grenon, dans les rôles titres (et diamétralement opposés), sont formidables. Je me suis amusée, par la suite, à me demander si elles auraient pu tenir respectivement le rôle de l’autre!?! Elles ont tellement le genre et le physique de leurs personnages. Ça parait presque impossible, même si ce sont de très bonnes comédiennes. Et puis en fait, ça n’est pas important, une question parmi tant d’autres que je me suis posée. Jacques L’Heureux (alias «Passe-Montagne» – vous comprendrez pourquoi je le mentionne si vous voyez le film) y tient un très improbable rôle, mais de très convaincante façon. Vraiment un rôle de composition, en tous cas en regard de ceux qu’ils a tenus jusqu’à maintenant. Les jeunes filles, Juliette Gosselin et Mylène St-Sauveur, sont également crédibles.
À la fin de la projection, j’avais un sentiment de déjà vu. Je n’arrive toujours pas à savoir si c’est effectivement le cas donc, et que j’ai vu un scénario semblable par le passé ou si, tout simplement, nous entrons tellement dans l’histoire qu’elle nous semble familière à ce point. En tous cas, il s’est passé ce qui se passe parfois quand j’écoute un film de ce genre, à savoir j’entre complètement dans l’histoire et, à un moment, je réalise que le grand sentiment de malaise que je ressens de façon très personnelle, ne s’applique pas à moi, en fait, mais bien aux protagonistes de l’histoire. Je suis toujours dérangée -mais fascinée- quand un film produit un tel effet sur moi. Habile.
Une cinéaste talentueuse, simple mais efficace. Qui a apparemment des choses à dire et n’a pas peur de le faire. Les images sont belles. La trame musicale est très appropriée.
Réal.: Louise Archambault, Québec, 2005. C’est elle qui a réalisé le (bon) court métrage «Atomic Sake», il y a quelques années.

La Neuvaine

Je savais le sujet difficile, j’en ai eu pour mon argent! Mais je m’attendais également à de très belles prestations et là aussi, j’ai été bien servie.
C’est l’histoire d’une femme médecin très humaine qui a vécu une perte tragique et un grand deuil, lui-même doublé, comme si ce n’était pas assez, d’une grande impuissance. Qui rencontre sur son chemin une autre femme, victime de violence conjugale, avec son enfant, et qui décide, certainement sans même réfléchir à deux fois au danger bien réel d’outrepasser son mandat, de les aider. Et qui en ressortira encore plus blessée et détruite qu’auparavant. Comme quoi, malheureusement, il est parfois vrai qu’un drame n’arrive pas seul. Ou comme quoi rien, finalement, puisqu’aucune logique ne peut expliquer de tels drames. C’est d’ailleurs une autre grande force de ce film, l’absence de jugement et de morale. Le constat, seul. Et les sentiments écorchés, à fleur de peau. Intenses et purs.
Un film sur la douleur, la grosse douleur lourde et insupportable. Celle qui enlève le goût de continuer et qui ne peut apparemment se surmonter seul… ce qui rend bien évidemment difficle, par conséquent, l’acceptation de l’aide, si nécessaire soit-elle. Cercle vicieux oblige. Mais c’est aussi et surtout un film sur la générosité pure, la gentillesse, le don de soi. Sans oublier la simplicité et la culpabilité. Rempli d’humanité, quoi. Avec toute la force dont elle est capable, mais toutes les faiblesses qu’elle comporte aussi.
Les comédiens sont étouffants de vérité et de crédibilité. Patrick Drolet et la formidable, que dis-je, l’immense comédienne Élise Guilbeault. Je pensais avoir vu sa plus belle prestation avec la «Femme qui boit» (du même réalisateur). Cette fois encore, elle nous jette à terre, littéralement. Je reste marquée et impressionnée par ses regards silencieux mais si complets, si remplis de sens, d’émotions et bien sûr, d’insoutenable douleur. En contrepartie, Patrick Drolet y est doux, sobre, si touchant et attachant. Un beau contraste avec son imposante carrure.
Un film lent, sobre, très contemplatif. Qui parle de religion sans en parler vraiment. Qui parle surtout d’amour, de déchirure et d’aide. Celle que l’on donne, gratuitement, et celle que l’on reçoit, tout aussi gratuitement mais parfois avec force difficulté, malgré nous.
Réal.: Bernard Émond, Québec, 2005.

La marche de l’empereur

J’ai vu ce film «en famille», disons, le week-end dernier. Et en banlieue, qui plus est! Prélude à un formidable moment? C’est ce que j’allais découvrir (ou non!)…
Ce film, tout en nature et en sobriété, nous raconte l’étonnante histoire (du moins, pour moi), de ce magnifique «peuple», les manchots surnommés empereurs (vous l’aurez bizarrement deviné). Dans leur terre de résidence, l’exigeante Antarctique.
D’abord, c’est vraiment intéressant, car on y découvre ces (magnifiques) petites bêtes, leurs coutumes et mode de vie, leur réalité et surtout les défis auxquels ils sont sans cesse confrontés. Honnêtement, j’ai beaucoup appris, c’est fascinant, je n’aurais jamais deviné! Ensuite, c’est tout en douceur, malgré la «violence» du sujet, parfois, si je peux m’exprimer ainsi (je parle principalement du froid et du vent, mais aussi des dangers qui les entourent!).
La narration, faite en grande partie par Romane Bohringer et Charles Berling, nous guide, doucement, par la main, tout au long du documentaire. Elle nous permet de faire partie des clans, on dirait. D’entrer un peu dans l’hsitoire. Les paysages sont vraiment beaux (et froids). La caméra est bien, mais pas à couper le souffle, comme je m’y attendais ou comme j’avais anticipé. Probablement relié aux limites techniques qu’impose un tel climat? Que sais-je, moi!?
Bizarrement, j’ai suivi ce récit et -je l’ai même vécu- à la façon dont on suit un thriller ou un suspense! Les fesses serrées, tout au long du film, parce que sympathique à leur cause et à ce qu’ils vivent, espérant très fort que tout se passe bien pour eux, malgré les dangers qui les guettent. De la rencontre à l’accouplement, puis la préservation de l’oeuf jusqu’au printemps, à l’éclosion… amenant, à son tour, son lot d’incertitude: la faim, les prédateurs, etc.
Un documentaire mais qui est comme une fiction en soi, avec de l’émotion, de l’amour, des drames (petits et grands) et des joies, qui le sont tout autant, des intrigues, de l’interaction, des bons et des méchants, tout pareil, quoi!?! Et pourtant, beaucoup de lyrisme aussi, de beauté, de tranquilité, de grandeur et parfois, de résignation. Avec une belle trame musicale (originale, je crois).
Petit phénomène étrange, en passant: il faisait froid, ce soir-là, et le film n’a apparemment rien fait pour nous réchauffer, puisque nous en sommes ressorties littéralement congelées. Débordement d’empathie? Trop plein d’imagination? Climatisation extrême!?! Pourtant, un si beau sujet, rempli d’humanité, qui nous réconcilie avec la nature elle-même – et ce qui est plus grand qu’elle encore…
Réal.: Luc Jacquet, France, 2005.