Catégorie : Inconditionnel

Pierre Lapointe – 5e salle de la PDA

Je ne m’étenderai pas longuement sur le sujet puisque je l’ai déjà fait à quelques reprises.
Mais je me devais d’en parler un peu… tellement ce dernier spectacle de la tournée «La forêt des mal aimés» m’a marquée.
D’abord, la salle. L’extraordinaire salle, qu’on aurait dit construite juste pour ce spectacle et pour Lapointe/ses musiciens.
Une toute petite salle, avec la scène au centre, tout en bas, et les gradins disposés autour. Magique. Je déteste ce mot qui me semble souvent dénué de sens ou utilisé hors contexte, mais cette fois-ci, c’était vraiment cela.
Et nous, si privilégiés, assis dans la 2e rangée du bas, en plein milieu, pouvant presque leur toucher en allongeant à peine le bras. Bizarrement, cette incroyable proximité a produit deux choses: une certaine pudeur et une certaine retenue. Comme si nous étions impressionnés (que dis-je: nous l’étions!) et que du coup, nous n’osions pas trop faire de vague.
Quoique moi, je suis incapable de rester de glace dans un tel spectacle, et encore moins devant Pierre Lapointe et toutes les émotions qu’il suscite et dans lesquelles il nous plonge inévitablement.
Ses musiciens sont tellement talentueux: le violoniste, la pianiste-accordéoniste, le guitariste-bassiste et celui aux claviers/aux arrangements. Quelle formidable équipe.
Lapointe est aussi drôle et désinvolte qu’on le connait. Il sait tellement parler à ses spectateurs et les charmer… c’est fou.
Ma seule déception (et c’est vraiment parce que c’est une de mes -sinon MA- chansons préférées): il n’a pas fait «Pointant le nord». Mais il en a fait tant d’autres… qu’est-ce que je suis chiche juste d’en parler!!!
Une fois de plus, un super spectacle, en super compagnie. Merci encore à Éric pour les improbables billets…

Volver

Le dernier film d’un de mes réalisateurs préférés. Et j’ai fait ce que je fais souvent quand il sort un film: je me retiens, je fais durer l’attente pour mieux apprécier le plaisir et, quand je n’y tiens plus, j’abandonne et je me rends… au cinéma en courant!
J’ai beaucoup aimé «Volver», mais ce n’est pas mon préféré. En fait, je dis ça et en y réfléchissant un peu, je serais bien embêtée de dire lequel de ses films serait effectivement mon préféré ?!? Parce que je les aime tous, chacun à sa façon et selon sa spécificité ou sa particularité. Mais comme ils ont tous la touche de ce réalisateur, sa grande sensibilité, sa folie, sa passion, son intensité, ses excès, sa pudeur, son sens du drame, son humour, chacun à différent degré.
Ce film raconte l’histoire de mères et de filles, des relations parfois difficiles, parfois complexes mais toutes loin d’être banales ni simples. Avec comme point de départ une mère décédée qui revient dans son village natal pour régler une situation restée en plan avec sa disparation. Un film empreint d’une grande pudeur, moins d’excès et d’exhubérance mais toujours autant d’amour, autant de drame, traité avec légèreté et humour. La musique est toujours aussi présente et intense, et nous livre ainsi les moments les plus émouvants et touchants du récit.
Almodovar s’est encore entouré de quelques-unes de ses muses, comme la formidable Carmen Maura, la très bonne Lola Dueñas et la surprenante Penelope Cruze, qui y est excellente.
De très belles histoires d’amour filial, d’amitié, de voisinage et, dans tous les cas, de relations savoureusement colorées et atypiques.
Réal: Pedro Almodovar, Espagne, 2006.

Babel

Un autre très bon film de ce formidable réalisateur (qui nous a donné les très bons «Amores Perros» et «21 grams»). À nouveau cousu d’intensité, de drame, où la ligne est si fine et où tout peut basculer, à chaque instant, dans le tragique total, le désastre absolu. Iñárritu installe et maintient une atmosphère incroyable de justesse. Nous gardant sans cesse en haleine, mais aussi dans le doute, la crainte et bien sûr, avec un intérêt soutenu.
L’histoire d’une arme à feu qui voyage à travers les gens et qui affecte ceux-ci de différentes façons, ayant des répercussions sur plusieurs continents (du désert du Maroc en passant par le Japon, les États-Unis, le Mexique). Autre exploit: malgré la grande portée de ce film, le réalisateur nous livre un document intimiste, avec des personnages très attachants, touchants, tellement humains.
Avec la très bonne Cate Blanchet, Brad Pitt (convaincant), Gael García Bernal (toujours bon) et Adriana Barraza qui est vraiment fantastique.
La caméra et les images sont aussi belles que froides, par moments, aussi puissantes qu’émouvantes, parfois aussi.
Un film qui nous parle de violence, de préjugés, de souffrance et de douleur. Mais qui déborde aussi sur l’amour, l’amitié, la vie… son sens et sa valeur inestimable.
Réal.: Alejandro González Iñárritu, É.U./Mexique, 2006.

Le projet Andersen

Si je pouvais écrire en 165 points, avec une typo imitation d’ampoules argentées et faire clignoter le tout, voici ce que j’écrirais: ROBERT LEPAGE EST UN GÉNIE.
Bon! Cela dit et comme je ne peux donc m’exécuter, je me contenterai de l’affirmer, le plus simplement mais le plus sincèrement du monde. J’ai envie de me faire plaisir en ajoutant que, comme il est bien souvent vrai que l’intention vaut pour beaucoup, j’espère que l’hommage n’en sera pas moins grand. Et surtout, surtout, prière de ne pas s’arrêter à la forme ultra convenue et kitsch que j’aurais donné à ce témoignage (les ampoules clignotantes), l’effet recherché n’étant, au fond, que de clamer aussi haut et fort que possible (dans ce contexte) mon admiration profonde et absolue.
J’ai déjà assisté à quelques pièces de Lepage. Et chaque fois, C-H-A-Q-U-E F-O-I-S, je suis renversée par son imagination hallucinante et débordante, son génie de la mise en scène (désolée pour la redondance, mais c’est, à nouveau, LE mot approprié), son avant-gardisme, qui est bien souvent également empreint d’une efficace et surprenante simplicité.
Et quel fabuleux comédien…
Je me souviens de lui à la LNI il y a plusieurs années. Quel talent! Dans ses pièces (quoique le mot semble ici tellement réducteur) et au cinéma, il est tellement crédible, authentique, on dirait presque qu’il ne joue pas. C’est difficile à expliquer, mais c’est vraiment l’effet qu’il me donne, chaque fois. Comme si les personnages lui collent si bien à la peau qu’il semble les incarner, dans la vraie vie. En même temps, plusieurs de ces personnages sont à forte saveur autobiographique, me direz-vous… je sais, mais quand même!
Dans le projet Andersen, Lepage s’intéresse au célèbre écrivain Danois, qui nous donna d’encore plus célèbres contes pour enfants. À sa manière, il nous raconte autant la vie mouvementée et coloréee de cet homme, qu’il nous parle de ses contes et qu’il se sert de différents personnages plus ou moins fictifs pour nous dévoiler (nous raconter?) encore mieux l’homme derrière l’écrivain. Et il joue tous les rôles, bien sûr, de formidable façon. Que ce soit un écrivain albinos québécois ou un directeur d’opéra parisien, qu’il incarne réellement et parallèlement, ou les personnages qui gravitent autour d’eux et que nous comprenons/devinons par la projection qu’il en fait grâce à ses principaux protagonistes… c’est brillant!
Ce qui me fascine le plus chez Lepage, c’est l’attention portée à chaque détail, chaque sortie de scène, chaque entrée de scène, chaque façcon de représenter un objet, une 2e ou une 3e dimension, un effet quelconque, un contexte. Même un chien! Ceux qui auront vu la pièce vont se souvenir de ses délicieuses petites scènes dans les parcs de Paris, où l’écrivain va promener le chien dont il a la garde. Tellement drôle, visuel, ingénieux. Et tellement simple, en même temps, ce qui ajoute à mon humble avis à l’intérêt de la chose.
Lepage se sert de projections, d’accessoires anciens et nouveaux -qu’il actualise toujours-, de graffitis, d’effets sonores et visuels, d’enregistrements, de musique, d’ordinateur, et j’en passe (et sûrement, sûrement, des meilleurs).
Nous retrouvons, intacts, toute la passion et le romantisme de Lepage. Et son humour. Un humour qui me rejoint tellement, me ravit. Dérisoire, auto-dérisoire, absurde et cynique. Toujours drôle et intelligent. Lepage est aussi provocateur, parfois cru, parfois peut-être un peu déstabilisant, mais toujours pertinent.
Je vous laisse deviner ma conclusion… et je vous invite à partager vos impressions, par la suite, s’il y a lieu!
Au TNM, conception, mise en scène et interprété par Robert Lepage (2005).