Catégorie : De mes yeux vu

Le coeur a ses raisons

Hmmmm. Certaines choses s’expliquent difficilement. Et la compréhension que nous en avons est donc proportionnelle à cet état de fait. Le cœur a ses raisons fait un peu partie de ces mystères, pour moi!
J’adore Marc Labrèche. Idem pour Anne Dorval. Et j’aime beaucoup Pascale Bussières, James Hyndman, Michèle Deslauriers, Patrice Coquereau, Sophie Faucher. J’aime cette émission, pour son côté absurde, parodique à l’extrême. Pour l’imagination débordante qui est à sa source. Pour l’exploit que représente certainement, pour les comédiens, le fait de proférer et d’enregistrer de telles sornettes. Qu’est-ce que j’en serais incapable! C’est tellement nono, parfois, comment font-ils pour garder leur sérieux??? (en fait ils ne le gardent pas, mais réusissent quand même à passer leur texte et leur point -ou manque de point, justement! chapeau!).
Ce qui maintient mon intérêt, c’est la façon de nous surprendre de fois en fois. Il y a bien sûr certains «patterns» -pour mon plus grand plaisir!-, et pour chacun des personnages. Parfois on rit parce ce qu’on sait exactement ce qu’ils vont dire ou faire, même si c’est complètement con, c’est justement ce qui est si drôle. Parfois encore, survient un événement, une réplique ou un clin d’oeil qu’on attendait tellement pas et c’est tout aussi (sinon plus) drôle.
Mais vraiment, ce qui m’étonne le plus, c’est que je suis cette émission avec intérêt et plaisir. Ça me fait vraiment rire! Normalement j’ai besoin d’un peu plus de subtilité, de nuances pour m’esclaffer. Je ne ris pas toujours, les gags tombent parfois un peu à plat. Mais en gros, ça le fait pour moi. C’est tout de même fascinant, quand on y pense, qu’un tel spectacle existe et soit diffusé à la télé. C’est tout aussi rafraîchissant que fascinant, d’ailleurs. Et rassurant, en un certain sens, en ces temps pauvres (oserais-je navrants?) de surabondance de télé pseudo-réalité.
Oui, on le sait, trop c’est comme pas assez. Mais je pense que beaucoup trop ne peut se comparer à vraiment pas assez, parce que ce genre de délire collectif et de parodie ne pourrait être possible autrement. HA! je tiens peut-être quelque chose, là!?!
Bravo pour l’imagination et les efforts, qui manquent terriblement à la télé en ce moment à mon humble avis. Bravo pour le courage, la folie. Bravo d’avoir osé et surtout, Bravo pour les délirantes prestations. Si le ridicule tuait, je n’aurais pu ni commettre, ni signer ce billet!
Réal.: Alain Chicoine, textes: Marc Brunet, TVA, 2004-2005.

Depuis qu’Otar est parti

Vous aimez déguster un cappuccino en regardant par la fenêtre d’un café, un jour pluvieux d’automne? La vue d’un enfant qui court vers son papa, en riant aux éclats? Une belle ondée rafraîchissante, après un après-midi de canicule? Vous aimez vous retrouver derrière un couple qui ressent subitement le besoin de s’enlacer et se donner un petit baiser, distraitement, sans raison apparente? Si vous avez répondu oui à l’une (ou plusieurs) de ces questions… je crois que vous aimerez ce film!
Quand on habite très loin, dans un petit coin tranquille et un peu perdu de Georgie, qu’on a pas grand-chose mais que ça nous suffit, puisque c’est comme ça, que le climat est plutôt arride et l’argent, trop rare… qu’est-ce qu’il nous reste? Il nous reste les liens, ceux d’amour et ceux du sang, les plus forts. Ceux de trois générations, en commençant par Ada, puis sa mère Marina et sa grand-mère, Eka. Des femmes simples, colorées, courageuses, généreuses, qui s’aiment beaucoup, même si elles se le démontrent parfois de drôle de façon. Mais tricotées serrées, comme on dit. Habitant toutes sous le même (petit) toit. Avec, entre elles, une tendresse infinie.
L’histoire est celle de ces trois femmes, dont l’oncle/le frère/le fils (Otar), parti gagner sa vie à Paris, envoit régulièrement des lettres, au plus grand bonheur de celles-ci et de Eka, plus particulièrement. Quand il meurt subitement, Ada et Marina décident de ne pas le dire à Eka, de peur qu’elle ne le supporte pas. Elle feront donc comme si. Jusqu’au jour où Eka décide d’aller à Paris voir son fils, une dernière fois. Improvisation et revirement de situation. Et comme le veut l’expression, les pommes ne tombent jamais bien loin de l’arbre, réalise-t-on!
Les trois comédiennes forment un fantastique trio. Elles sont merveilleuses, attachantes. On croirait presque un documentaire, par moment. L’aînée, qui joue Eka, a 88 ans. Elle est incroyable! On a envie de l’avoir pour grand-mère, nous aussi, même pour un instant!
La réalisation est simple, tout en douceur, réaliste, dénudée d’artifices mais remplie de sincérité, de tendresse, de spontanéité. Un projet sur mesure, on dirait, tant pour la réalisatrice que les comédiennes.
Réal.: Julie Bertuccelli, France/Belgique, 2003.
P.S. Si vous avez envie (et un peu de temps) après le film, regardez le «making of». Une histoire d’amour, remplie de portraits de famille, aussi jolie que le film lui-même…

Mar Adentro (La mer intérieure)

C’est le récit tiré de la vie de Ramón Sampedro, un espagnol qui passa 28 ans de sa vie cloué à son lit, suite à une mauvaise chute qui le laissa tétraplégique, en attendant et réclamant de toutes ses forces le droit au suicide assisté (de façon légale), puisqu’il ne pouvait vraisemblablement le faire lui-même. Il entama un long combat juridique pour lui-même, mais aussi pour aider tous ceux qui souffrent comme lui, sans issue possible, et choisissent de mourir. «La vie est un droit, pas une obligation. Comme la mort.», dira-t-il.
Un film, ou plutôt un hymne à la liberté totale et inconditionnelle, celle de vivre ou d’arrêter de vivre, dans la dignité, quand cette vie m’a plus de sens ou de signification propre.
Un hymne tout en douceur et en humanité. Qui ne prend pas partie mais qui raconte une histoire vraie, difficile et touchante, de magnifique façon. Les images sont belles à pleurer (pas seulement les images, soit dit en passant…!). La musique vient envelopper le récit et les paysages comme une brise toute chaude au retour de l’été.
Tous les acteurs sont formidables, criants de vérité et de simplicité. Ici, pas de chichi, pas de flafla, tout est dit simplement, ou à travers le regard. Bien sûr, j’ai une mention toute spéciale pour Ramón, le personnage principal joué par Javier Bardem (magistral), mais aussi pour son neveu et sa belle-soeur qui sont tellement vrais et émouvants.
Amant de la musique et de la poésie, ses seuls refuges, Ramón voyage dorénavant à travers celles-ci, nous entraînant avec lui. Le rythme lent, presqu’engourdi, un peu à l’image (obligée) du principal protagoniste, nous mène doucement à travers le film, comme la douloureuse mais obligatoire réflexion qu’il suscite sur ce grave débat.
J’ai beaucoup aimé qu’on ne juge pas, en nous présentant tous les déchirants côtés d’une si complexe médaille, si je peux m’exprimer ainsi. Personne n’a tort ni raison, chacun a une opinion et/ou respecte simplement celle de l’autre. Ou s’oppose, s’insurge, au nom de l’amour ou de la vie même. Peu importe en fait, ça nous fait réfléchir. Et c’est vraiment déchirant, bouleversant.
Réal.: Alejandro Amenábar, France/Espagne/Italie, 2004. C’est également lui qui signe la superbe musique et l’adaptation cinématographique de l’histoire.

Maman last call

Je n’ai pas lu le livre alors je ne peux comparer. Mais dans le film, le scénario m’apparait un peu éparpillé, disons. Va pour le couple qui hésite à avoir un enfant, va pour Alice, la journaliste et personnage principal, qui a peur de la maternité tout en la désirant viscéralement. Va pour sa mère, ses amis et les relations qu’ils partagent. Mais les querelles de bureau, les jalousies professionnelles, les coups d’éclat médiatiques, les vengeances, me semblaient exagérées et parfois même superflues.
J’ai aimé le côté réaliste, qui rejoint la situation actuelle de notre société, soit le grand questionnement d’avoir ou non des enfants, la place de notre carrière et de nos relations dans notre vie, l’égoïsme, aussi, ou la peur, peut-être?, celle du bien-être dans lequel nous vivons parfois et que nous ne voulons pas perdre. La problématique de l’âge dans tout ça. Tous des sujets intéressants à soulever et on ne peut plus d’actualité. Mais l’ensemble m’est souvent apparu comme beaucoup trop exagéré, caricatural. C’était peut-être le but, mais ça m’a un peu agacée. Heureusement, c’est souvent rigolo, ce qui aide.
Sophie Lorain est sûrement très très bonne dans ce rôle car elle a réussi à me rendre sympathique un personnage à la limite de la bêtise humaine et de l’hystérie (collective et individuelle). Elle me l’a même rendu attachante par moments. Bravo! Patrick Huard est bon, sobre, assez crédible. Mais ça doit être son passé de comique, car j’ai parfois un peu de misère à le prendre au sérieux. Je suis une inconditionnelle et elle ne fait pas exception ici non plus: Anne-Marie Cadieux est tellement drôle, délirante, émouvante dans son rôle de composition (en miss météo superficielle et nunuche). Un grand plaisir!
C’est un bon divertissement, bien réalisé, plutôt drôle, avec un bon rythme. J’aurais aimé un peu plus de nuances. Ce qui était peut-être et tout simplement trop éloigné de la nature mème de l’auteur, et de son histoire personnelle?
Réal.: François Bouvier, Québec, 2004, tiré du livre éponyme de Nathalie Petrowski.

Million Dollar Baby

Je suis allée voir ce film un peu par curiosité, car le sujet ne m’intéressait pas vraiment, mais aussi pour Hilary Swank, Morgan Freeman et Clint Eastwood que j’aime, tous trois, beaucoup. Malgré la dureté de l’histoire, je ne l’ai pas regretté car ça m’a beaucoup touchée.
Je ne sais pas s’il s’agit vraiment du meilleur film de 2004 (puisqu’il a gagné depuis l’Oscar du meilleur film et celui du meilleur réalisateur). Ce que je sais, par contre, c’est que c’est un film simple, touchant, sur le courage, la loyauté, l’amitié et la dignité humaine. Sur les difficultés de la vie et sur les réflexes humains, comme la lâcheté et la peur.
Un film qui fait l’éloge d’une jeune femme venue de nulle part, qui n’a rien devant elle sauf ses deux poings, et qui, à force de travail, de détermination et d’entêtement (et donc avec l’aide de son entraîneur), deviendra une championne mondiale. C’est certainement ce qui a tant touché les amerloques, d’ailleurs. Exactement leur genre de rêve américain, ça. Et c’est vrai qu’on embarque dans l’histoire et qu’on y croit, que dis-je!, on y prend totalement partie!
Je ne vous raconterai pas l’histoire dans le détail, ni la fin, par respect pour le film et ceux et celles qui iront le voir. Mais je vous dirai qu’Hilary est vraiment excellente dans ce rôle. Incroyable comme elle peut si bien rendre des personnages au destin tellement tragique et surtout, sans artifices aucun, des gens d’une simplicité parfois presque navrante. Elle méritait certainement l’Oscar, mais je crois qu’elle n’était pas seule cette année (mais ça, c’est une toute autre histoire!).
Clint en entraîneur de boxe et Morgan en ancien champion-boxeur, recyclé en concierge de gym, forment un duo d’amis attachant, sympathique, dont la relation d’amour et de déchirure remonte à très loin. J’ai également eu un gros coeur mou pour le jeune acteur qui campe un espèce «d’innocent» qui s’entraîne tous les jours pour devenir un champion, même si dans les faits nous savons tous (ou presque…) qu’il ne s’agit que d’un rêveur des plus innofensif.
J’aime un film qui me raconte des histoires de coeur, de courage, de peines, de joies aussi. J’aime un film qui ne comporte pas de scène de grosse violence gratuite (à part la boxe, puisque c’est le sujet!, mais je veux dire sans armes, sans tueries, etc.). J’aime un film qui n’a pas besoin de nous montrer de personnes nues ni de scènes sexuelles ou torrides quelconques. J’aime un film qui nous touche simplement par les thèmes qu’il aborde, surtout quand il n’est pas trop moralisateur et encore plus, quand il ne prétend pas avoir toutes les réponses, ni que la vie est facile ou magique. C’est en grande partie pourquoi j’ai beaucoup aimé «Million Dollar Baby».
On se prend tellement d’affection pour la relation «de sang» qui s’établit entre la jeune boxeuse et l’entraîneur. Pour cette confiance, ce respect, cet amour filial et noble. Des valeurs qui ne sont plus très à la mode, en fait. Qui demandent un certain courage et une dose d’humilité, devant comme derrière la caméra.
Réal.: Clint Eastwood, É.U., 2004.